combien de temps rester là
à regarder danser l’inaccessible
et sa caravane d’ombres
sur la tapisserie des jours
avant d’aller dans les méandres, cette inquiétude
distillée qui donne aux mots la légitimité
du ressac : ce désir insurgé, qui joue et rejoue
sa partition des heures morcelées qui nous
séparent
ces taches informes seraient des vipères
filant dans les ronces insondables
puisqu’au réveil je retrouve le soleil froid
l’écho d’un rire derrière le brouillard épais
de l’attente et son nid vide, je regarde la lampe
éteinte, au verso de l’ennui je déchiffre tous
ces si seulement ces peut-être
qui font voyager nos songes
comme des fourmis sur la margelle d’une piscine
mes yeux piochent sans fin dans l’air
pour garder l’élan de ton souffle
mais quand je dis tu je parle à ton absence
à cette voix qui pourrait être la tienne
quand je dis tu je parle encore trop
alors comment construire ce qui sauve
comment compter sans répit tous tes visages
s’extraire de la grisaille
pour que la peinture ne sèche pas
prendre tous les détours possibles
malgré tous ces morceaux de nous jetés
dans l’incertain
mur, robe blanche et tee-shirt NY fucking city
ou peut-être simplement une pièce de deux dinars
posée sur la table de nuit, près du lit
tout ça ferait tenir les mots ensemble
voudrait dire quelque chose
le présent décanté comme si de rien n’était
les cris balbutiés haussés jusqu’à l’éclaircie
même si pas assez n’est toujours pas assez
et trop n’est jamais trop
ai-je payé ma dette à la patience, avec ces mots
qui ne sont plus à leur place, qui glissent hors
de leur propre disparition, pour balayer ce tourbillon
et faire fuir les corbeaux leurs cris inextinguibles
entrouvrir la fenêtre son bleu tout neuf
et soulever le voile du bout des doigts recueillir
ces instants qui trébuchent