Revue de poésie contemporaine

Distances

D

J’ai cueilli des fleurs sous leurs cou­leurs mortes
et je les ai posées dans la mémoire
où tu ne reviens que pour fer­mer tes fenêtres,
tes volets, tes yeux, tes silences.
Où tu ne reviens que pour disparaître
chaque jour un peu plus.
Moi je te chante encore,
mais dans des chansons
que le vent ne sait plus où porter.

*

Je m’en vais quelque part,
je reviens je ne sais pas d’où.

Les pays que j’ai parcourus
m’ont cares­sé de vent et de sable,
aucun ne m’a cloué à son soleil.

Mais res­ter libre d’en revenir
c’est être libre de les oublier : j’ai vou­lu voyager
sans pas­sé à poser dans des traces.

*

Je garde du ciel pour plus tard
et j’éteins celui-ci
pour qu’on ne me voie ou me vise
pen­dant que je jette le vent dans vos arbres,
le feu dans vos greniers,
pen­dant que j’arrache
d’entre vos mains jointes
vos fausses prières,
pen­dant que j’emplis
de sable votre soif.

C’est moi que vous enten­dez entrer de nuit
dans tout ce que vous êtes et possédez
pour le détruire,
pour qu’au vôtre jamais
ne res­semble mon ciel gar­dé pour plus tard.

Auteur(s) / Artiste(s)

Jean-François Mathé

Jean-François est né le 30 mai 1950 à Fontgombault, dans l’Indre. Après une enfance difficile, il entreprend des études de lettres à la faculté de Poitiers. Un temps dessinateur de presse pour Télérama ou La Vie, il enseigne les lettres modernes à Loudun dans un premier temps, mais effectue l’essentiel de sa carrière au lycée Jean-Moulin de Thouars, où il réside. C’est par sa découverte de la poésie de Paul Éluard qu’il vient à l’écriture. Il cultive les amitiés, continue de pratiquer le dessin, et aime également chanter, accompagné de sa guitare. Auteur d’une vingtaine de recueils, dont la plupart chez Rougerie, son œuvre est couronnée de plusieurs prix, dont le prix Antonin-Artaud en 1988 et le prix international Guillevic en 2013. Il s’est éteint le 29 novembre 2023 à Faye-l’Abbesse, dans les Deux-Sèvres, un an après son épouse, Nicole.

Bibliographie
  • J’ai demain pour mémoire (J. Millas-Martin « Grand fond », Paris, 1971)
  • Mais encore (Rougerie, Mortemart, 1981)
  • Contractions supplémentaires du cœur (Rougerie, Mortemart, 1987)
  • Corde raide fil de l’eau (Rougerie, Mortemart, 1991)
  • Sous des dehors (Rougerie, Mortemart, 1995)
  • Poèmes poids plume avec des illustrations de François Baude (Le Dé bleu « Le Farfadet bleu », Chaillé-sous-les-Ormeaux, 1998)
  • Le temps par moments (Rougerie, Mortemart, 1999)
  • Le ciel passant (Rougerie, Mortemart, 2002)
  • Agrandissement des détails (Rougerie, Mortemart, 2007)
  • Bibliographismes Bibliocencenadis, édition bilingue français-occitan, avec Jan dau Melhau (Las Edicions de Sent Jaume, Meuzac, 2011)
  • Chemin qui me suit précédé de Poèmes choisis 1987-2007 (Mortemart, Rougerie, 2011)
  • Grains de fables de mon sablier avec des illustrations de Charlotte Berghman (Éditions les Carnets du dessert de lune « Lalunestlà », Bruxelles, 2014)
  • La vie atteinte (Rougerie, Mortemart, 2014)
  • Retenu par ce qui s’en va (Éditions Folle Avoine, Bédée, 2015)
  • Prendre et perdre (Rougerie, Mortemart, 2018)
  • Vu, vécu, approuvé (Le Silence qui roule « Poésie du silence » n°2, Beaugency, 2019)
  • Ainsi va (Rougerie, Mortemart, 2022)
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