Extraits du livre paru aux éditions Gros Textes, 2013
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dans ma tête je macère du matin au soir – quand quelqu’un m’en tire et me refait voir le monde – je me sens comme si j’étais une perruche en cage et que la couverture s’en va – de l’endroit où je suis je peux voir mes pensées et des arbres qui bougent agités par le vent
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et je viens de comprendre que quand on place deux miroirs l’un contre l’autre face à face ils ne contiennent pas l’infini mais juste le néant contrairement à ce que je pensais quand j’étais un enfant
20
après trente ans des tas de choses s’accumulent – pas que des souvenirs ou des regrets mais des tasses aussi et des assiettes en nombre invraisemblable – des verres et tout ça se lave et se range et nous vole du temps et toutes nos fourchettes creusent notre tombe
33
j’ai été faire un tour dans l’ancienne année – à sept heures du soir – elle ressemble à la nouvelle à sept heures du matin
69
les moineaux – les moineaux qui quittent leur ligne à haute-tension – qui partent de partout – qui ont l’air soudain d’hésiter – qui groupés en nuée reviennent sur leur fil et puis n’en bougent plus – groupés et attentifs sous les nuages en mouvement
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rouler sans but – n’aller nulle part – être certain de ne jamais se perdre – ne jamais savoir – délibérément – ne jamais savoir d’où on vient – ne jamais savoir – surtout pas – ne jamais savoir où on va – ignorer toujours – ignorer toujours où on est – être certain de ne jamais mourir – être une mouche – une putain de mouche – une mouche immortelle