Les mots dits
(à haute voix)
Les mots sédimentent,
mentent
oui, les mots mentent.
La main les encre,
les ancre
sur la page blanche.
Les mots — menthe-
menthe à l’eau
qui dilue l’encre
des/encre les mots
qui vont à la dérive
au- delà des rives.
Des mots de rien
qui ne font vivre
qui ne font livre.
Blanc- noir :
(à haute voix)
Tracé blanc sur une nuit noire
craie blanche sur tableau noir
trou noir de l’élève livide
craie en main.
Main mise de l’écrit,
écrit de poussière blanche
pour mots volatiles.
Alors quoi, avant que la pâte
à livre ne soit sèche
et porte dans sa page
les mots du crâne,
le crâne aura depuis longtemps
blanchi !
L’aimant
L’aimant perdait la tête, surtout les jours d’orage.
Dans l’air il y avait de la tension, de l’attention, voire de la haute…..
L’aimant était surexcité, en homo erectus qu’il était.
Il y avait de l’éclair dans l’air, à en être foudroyé au point de ne pas s’en relever.
C’était la confusion des pôles, l’ingouvernable route, la vie était désaimantée.
Le processus survient encore les jours de désamour, où l’on perd son aimant, où l’on a plus la tête à soi. On va en dehors des rails : déraille, déraille…Les trains ne mènent plus nulle part, on a perdu son nord, et sa bonne étoile en même temps. On ne s’attire plus, donc on ne le retient pas, seuls les souvenirs s’accrochent et dans la glace son image partie, ne reste imprimé que votre reflet qui lui aussi se fane.
Lorsque l’on est amoureux, on est trop occupé pour penser à soi : on se pense autre, puisque l’on est plus à soi en bref, on n’est plus que le reflet de soi-même. D’ailleurs on ne pense plus, à part penser à l’autre. Tout est en fonction de l’autre, on pourrait dire : être à l’ère de la pensée unique et ne dit-on pas : « mon unique pensée, c’est toi ! ».
Les flux neuronaux, et le temps sont les seuls régulateurs de cet état de fait. L’autre que l’on sublimait, avec qui l’on fusionnait dans la lumière qui le nimbait, se voit ne plus être que le reflet de lui-même, l’auréole lui est ôtée. Il se voit ne plus être l’unique objet de nos pensées : ses propres pensées lui sont rendues, et l’on repart avec les siennes.